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La saison de l’été voit de nombreuses personnes en recherche de spiritualité se mettre en chemin vers Compostelle. Je n’ai jamais fait cette démarche. Pas encore… Ce que j’ai compris de cela à travers tout mes amis qui m’ont partagé leur expérience, c’est bien que ce n’est pas la destination qui est importante. Ce qui remplit chacun, c’est bien plutôt l’expérience que procure la marche elle-même et les rencontres. Ces rencontres sont celles que l’on fait avec les autres pèlerins et elles sont souvent belles. Mais c’est avant tout, je crois, la rencontre avec soi-même, dans le silence du chemin, dans la confrontation avec son corps physique, dans cette petite transe que permet le rythme lent des pas posés l’un après l’autre. Je vis une chose comparable lorsque je peins. Dans le fait de peindre, bien plus que le résultat, c’est le fait d’être debout devant ma toile, de la couleur à la main et la sensation que cela produit en moi qui est intéressante. C’est aussi le fait de l’expérimentation. Une toile qui commence, c’est un nouveau chemin qui s’ouvre, avec ses surprises, ses intentions déçues, ses surprises inattendues. C’est la confrontation entre le dessein et le réel. La matière résiste. Le sujet peine à apparaître et il se dérobe parfois. La technique soutient et parfois contraint, elle donne de la maitrise autant qu’elle enferme parfois dans des limites. Peindre, c’est pour moi expérimenter dans une forme de confrontation au réel. C’est également me rencontrer et apprendre à lâcher-prise autant qu’à maîtriser. Le chemin est pour moi de découvrir comment je réussis à n’écouter que mon envie et à ne pas (trop) me comparer aux autres. C’est découvrir que ce que je fais touche l’autre et qu’un dialogue s’installe parfois entre deux sensibilités. C’est me confronter à mes limites, à mes peurs et mes manques de courage. Je vois comment parfois je m’autocensure, que je me retiens de peur de paraitre prétentieux ou nul et je reconnais là la voix de mon mental égotique qui juge mon travail et attend des retours positifs pour s’en enorgueillir. C’est reconnaitre avec humilité ma maladresse et les progrès que je pense devoir faire pour atteindre mes critères de satisfaction. C’est faire le tri entre ce que je crois devoir faire pour me conformer à mon éducation, aux croyances limitantes héritées de mon entourage, aux injonctions existentielles qui façonnent ma personnalité égotique (reste petit, dépêche toi de grandir, ne sois pas important…). C’est définir mes valeurs, du beau, du bon, du bien et ainsi voir à l’oeuvre dans quel mème culturel (paradigme lié au niveau de conscience – cf Graves) j’évolue et lesquels sont à nourrir en moi actuellement. Bref, c’est faire tout un chemin vers moi-même et en rendre le monde témoin. C’est avancer sur le chemin pas à pas. C’est encore reconnaitre à chaque instant que tout est juste et parfait.